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Grèce...pour ne pas perdre son latin
Grèce...pour ne pas perdre son latin

Nous vivons en Europe des jours agités. La situation en Grèce a troublé, trouble et troublera le consensus des politiques autoritaires et antisociales que l’ensemble des gouvernements de droite ou de gauche libérale acceptent d’appliquer avec délice. Et tant pis pour les peuples qui subissent les surenchères des impératifs de la rentabilité financière à gogo ! La démocratie vit des moments très difficiles et la situation en Grèce en est un révélateur, comme le sont les 16 heures de pression ahurissante des dirigeants européens sur ceux de la Grèce de dimanche à lundi !

Les dirigeants grecs, le premier ministre élu fin janvier dernier, ont été sommés de prendre en compte pour la gouvernance de leur pays l’application d’une austérité destructrice, d’un programme de ruine sociale et économique, de vente des richesses culturelles historiques et touristiques. La volonté délibérée des organisateurs de cette Europe du capitalisme financier est de réduire ce pays au rôle abject d’une colonie des puissances de l’Ouest. Tel était et reste l’objectif qui demeure. Les plans d’austérité alignés depuis dix longues années, ont ruiné la Grèce, les aides financières tant de fois vantées n’ont jamais été utilisées ni pour la relance économique, ni pour maintenir un niveau de vie acceptable. Tout a été fait afin de servir l’intérêt des banques des pays de l’Ouest et d’une minorité de profiteurs grecs enfermés dans la triche, dans les magouilles et les scandales…

Fidèle à sa démarche démocratique qui exaspère plus d’un technocrate ou oligarque bien en place, le gouvernement grec a présenté dès vendredi sa copie et sa stratégie d’action devant son assemblée nationale pour respecter les droits des représentants de sa nation. Le débat a été sérieux, responsable, vif et au bout du compte a permis à Alexis Stipras d’obtenir un mandat clair en vue des discussions pour un accord au sein de l’Euro-groupe affirmant de fait le maintien de la Grèce dans l’Europe. Cette manière de faire était, non seulement porteuse de dignité et de respect, mais aussi pouvait être favorable à moyen et long terme à une sortie de crise. Ajoutons que la sortie de l’Euro n’était pas la préoccupation majeure du peuple grec. Celui-ci à près de 80% dans le moment présent entendait y rester ! La thèse du « grexite » temporaire ou définitive comme le réclamaient avec insistance les leaders de l’Allemagne, droite et sociaux libéraux ensemble, n’était pas de mise, et c’est en soi un échec pour les ultras d’une nouvelle Europe politique, en tout cas pour l’instant !

On comprend qu’une fois encore se soient déchaînés les pouvoirs politiques et médiatiques dans tous les pays « donneurs de leçons austéritaires ». Qu’est-ce que l’on n’a pas entendu de la part de ceux qui n’ont même pas pris la peine de lire sérieusement l’ensemble des proposions. « Tsipras a rompu ses engagements initiaux, », voilà depuis huit jours la formule passe partout ressassée du matin au soir ! On sait par expérience que la campagne de déstabilisation de Syriza et des forces de transformation sociale de l’Europe, ne peut pas prendre une autre posture, les enjeux politiques à court et moyen terme sont trop graves ! Pour ceux qui ne voyaient plus à quoi correspondait la confrontation de classe dans nos sociétés modernes, l’expérience est édifiante.

Soyons donc sérieux et objectifs, regardons-y de plus près en appréciant le sens donné à la lutte de Syriza face au mastodonte de l’alliance politico financière européenne.

1°) Admettons et disons-le en fonction même des contenus de son référendum, la Grèce entend rester membre à part entière de l’Europe et de sa monnaie. Ses critiques sur le manque flagrant et grave de démocratie de gestion ne s’effacent pas pour autant et l’on comprend que le camp des faucons se soit répandu en nouvelles menaces de rupture…

2°) Soulignons que les bases d’un accord dans l’Euro- groupe d’une part et d’autre part auprès de la BCE ne pouvaient trouver forme sans des compromis inscrits dans le temps avec des conséquences de longue portée. C’est ce à quoi ont travaillé les Grecs ces temps derniers évitant autant que possible de se laisser contraindre par les pesanteurs diffusées par les « faucons » de l’Europe financière. La bagarre était disproportionnée !

3°) Il ne pouvait être question d’un accord qui n’envisagerait pas des contreparties en particulier sur les aides au plan de relance économique à court et moyen terme. On parle ce matin d’un apport possible de 80 milliards à injecter dans l’économie grecque sous des formes diverses dont l’arrivée de liquidités sur trois à quatre jours desserrant l’étranglement actuel de la consommation populaire, mais cela reste à se mettre réellement en oeuvre pour l’intérêt des populations.

4°) Si l’on doit mesurer la teneur des concessions faites qui pèseront immanquablement sur la vie sociale, l’on doit aussi mesurer le rapport de force qui sou tend les conditions de discutions à l’intérieur de l’Europe actuelle et qui conduisent à cela. On peut apprécier la volonté affirmée par la délégation grecque de rester maitre de sa souveraineté en remettant à leur place les prétentions du FMI et des autres Institutions. Des institutions qui voudraient contrôler les administrations à la place de l’Etat Grec?

Ce qui vient de se passer, avec le référendum et ses suites démontre indiscutablement la difficulté des dirigeants grecs à pouvoir faire valoir les droits et devoirs de leur population qui souffre de la mise sous tutelle qui dure en Grèce depuis de très longues années. Mandaté pour obtenir des réparations A Tsipras a lancé toutes ses forces dans les multiples rencontres pour négocier un accord qui sorte les grecs de l’impasse dans laquelle il a trouvé son pays en janvier 2015. Négocier oui, passer des compromis oui aussi mais pour cela encore faut-il que les dés ne soient pas pipés ! Or non seulement ce n ‘est pas le cas en Europe mais plus, la délégation grecque a pris place aux tables de discussion avec un fusil dans le dos ! Dans de telles conditions que pouvait-il sortir de très positif pour la Grèce ? Avoir une évaluation de l’acceptable immédiat, pour mieux rebondir ensuite ? Pas simple ni à comprendre ni à faire.

Et ici en regard du besoin de « justice et de solidarité, » (les bons mots si souvent utilisés des chefs de gouvernements) n’oublions pas le besoin impératif indiqué par la Grèce de renégociation de la dette que les dirigeants allemands et la BCE se refusaient d’envisager obstinément jusque-là ! Notons ici, que ce matin, F Hollande qui se vantait d’avoir sauvé la Grèce et l’Europe à grands coups de menton a eu plus que du mal à s’exprimer sur ce point, pourtant abordé dans l’accord dans des termes à préciser pour être crédible véritablement !

Quand on entend parler, de la même manière, de « confiance et de respect », on peut, fort des expériences vécues, se poser légitimement la question : Berlin et Bruxelles, accepteront-t-ils de s’inscrire dans la même démarche de dignité que celle du gouvernement grec ? La réponse est déjà connue ! L’Etat français tiendra-t-il tête aux pressions honteuses et sans bornes des « carnassiers financiers » allemands? Les incertitudes les inquiétudes demeurent et du levé de celles-ci dépendent et la sortie de crise pour un avenir social du peuple grec plus radieux, et une capacité de transformation démocratique de l’Europe. Si ce n’est sa transformation fondamentale éradiquant le rôle mortifère de la finance ?

En ce lundi de week-end du 14 juillet, alors que l’accord est largement commenté comme à l’habitude sans nuance par des médias bien éduqués aux idées néolibérales, y verrons-nous plus clair ? La seule certitude qui subsiste est celle du besoin de vigilance et de l’impératif de la poursuite de la lutte des peuples, du peuple grec si largement secoué. Une lutte qui se doit de reprendre de plus belle sur tous les terrains, avec d’autres trajectoires sur les objectifs de la transformation citoyenne attendue et adaptée à chaque pays!

PAUL CRESPIN Montluçon le 13/07/15

Tag(s) : #Grèce

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