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Étrange manifestation à Quimper ce samedi 2 novembre. Des ouvriers défilant avec leurs patrons alors que ces derniers revendiquent haut et fort plus de flexibilité et moins d'impôts. C'est ainsi que même la représentante de FO a été sifflée lorsqu'elle qu'elle a fustigé les bas salaires des travailleurs de l'agroalimentaire et les subventions distribuées aux patrons voyous. Voir à ce propos l'article de Médiapart (ICI ou plus bas en doc attachée pièce N°1 pour celles et ceux qui ne sont pas abonnés au journal).
Ce sont certaines PME qui sont à l'origine du mouvement de protestation contre l'écotaxe, car ce sont elles qui sont le plus concernées par cet impôt. Est venu se greffer ensuite toute la colère des bretons qui voient leur économie locale péricliter avec les fermetures de plusieurs usines emblématiques de l'agroalimentaire et c'est cet assemblage très hétéroclite qui a manifesté ce samedi comme l'analyse un commentateur anonyme dans rue 89 et qui décrit le début de la manifestation à Quimper (lire LA). Extrait : "Les gens descendaient de voitures, arborant fièrement leurs bonnets Armor Lux, se prenant en photos avec leur iPhone et leurs écharpes. Ils étaient nombreux, souriants avec leur Audi, Nissan ou pick-up. Chaussés de bottes plutôt Bessec que caoutchouc. Ce n’était pas des T-shirts roses qui prônaient un papa et une maman, mais bien des bonnets rouges qui étaient vendus 5 euros. Et ça débitait les billets de cinq. Alors ensuite, oui, la foule d’anonymes est arrivée, moins souriante, plus crispée. Mélange des genres". Tout est dit.
Pourtant, c'est ensemble et dans la plus grande confusion des revendications que va défiler cette foule disparate alors que souvent les revendications des uns vont à l'encontre des intérêts des autres. Car de quoi s'agit il en vérité ?
On se rappelle que les abattoirs en Bretagne sont en grande difficulté en raison du fait que ceux-ci n'ont pas modernisé leurs usines. Du coup les unités de transformation en Allemagne sont bien plus performantes et plus rentables, car les allemands ont lourdement investi dans leur appareil productif. Les unités sont dix fois plus grosses que les unités de production en Bretagne et utilisent de la main d’œuvre venue de Hongrie et de Bulgarie. Or, cette concurrence a été fatale à la filière bretonne, ce qu'explique très bien l'article paru sur le site de France TV Info (Lire encore ICI).
C'est dans ces conditions que les intermédiaires entre producteurs de porcs et les abattoirs ont décidé de procéder à l'abattage et à la transformation de la viande là où c'est le moins cher. c'est à dire en Allemagne et les camions affrétés par ceux-ci sillonnent également les routes de Bretagne (et les démolissent au passage) pour acheminer les porcs vers leur destination, privant du coup la Bretagne de l'activité de transformation sur laquelle reposait en partie son économie. Or, l''écotaxe avait aussi pour but de taxer les transports de ce type qui détruisent l'économie locale.
Dans ces conditions, c'est un étrange paradoxe que de voir défiler côte à côte les salariés privés de leur emplois pour cause de délocalisation de leur activité en compagnie des patrons et des transporteurs routiers qui l'organisent. Il reste cependant que l'écotaxe a été mal pensée, car cette dernière impacte aussi les transports en local, ce qui est absurde. Il faudrait donc revoir entièrement le système de manière plus ciblée et offrir aussi une alternative de transport crédible.
De toute façon, le vrai scandale de l'écotaxe réside ailleurs. Médiapart a fait des révélations fracassantes à ce sujet (lire encore LA). La droite avait en effet organisé, lorsqu'elle était encore au pouvoir, un partenariat public/privé qui devait permettre au prestataire privé "Ecomouv" de percevoir l'écotaxe et de prélever au passage sa dîme qui représente environ 20% des sommes perçues. « C’est le grand retour des fermiers généraux », dénonce Élie Lambert, responsable de Solidaires douanes. On apprend au passage que La banque américaine "Goldman-sachs" possède 10% du capital de cette société. On le voit, le problème de l"écotaxe est bien plus vaste qu'il n'y parait et Médiapart parle d'un nouveau scandale d’État qui pourrait bien éclater prochainement car en cas de résiliation du contrat avec la société Ecomouv les contribuables devront verser 800 millions d'euros au prestataire. C'est cette révélation qui a définitivement convaincu certains députés qui réclament maintenant l'ouverture d'une enquête parlementaire.
En marge de la manifestation de Quimper d'autres manifestants avaient décidé de défiler, mais à Carhaix. Moins nombreux certes, mais tout aussi déterminés, ceux là ne voulaient pas se retrouver en compagnie des patrons qui organisent dans leur dos le dumping social. C'est contre les suppressions d'emplois qu'ils en avaient. Les 3 000 avaient répondu à l'appel unitaire de la CGT de la FSU et Solidaires. C'est dans ce cortège que tous les salariés avaient vraiment leur place.
pièce N°1, le reportage de médiapart à la manif des bonnets rouges à Quimper
Pièce N°2, article de médiapart à propos de l'écotaxe